Le premier discours à la nation du Président Macky SALL en avril
2012 fut marqué par une volonté ferme de rompre avec les pratiques peu
orthodoxes dans la gestion de nos affaires publiques. A cette occasion le
Président disait ceci : « Au Gouvernement, je donne mission de
traduire en actes la forte aspiration au changement massivement exprimée le 25
mars. Cette occasion historique constitue pour nous tous, un nouveau
départ pour une nouvelle ère de ruptures en profondeur dans la manière de gérer l’État au plan institutionnel et économique ». En tenant ce propos, le
Président avait donné un signal fort à l’endroit de tous ceux qui ont eu ou
aspirent à gérer les deniers publics. Dès lors, quoi de plus normal que ceux
qui se sont enrichis sur le dos du pauvre contribuable répondent de leur
gestion devant la justice ? C’est en cela que la convocation de Karim Wade
par la cour de répression de l’enrichissement illicite (CREI) et son actuel
séjour à la prison de Rebeuss sonnent à la fois comme une exigence démocratique
et une leçon à tous ceux qui aspirent à s’enrichir indûment. Dans le même
sillage le Président avait averti ses collaborateurs actuels par le propos
suivant : « C’est pourquoi, je tiens à ce que toutes les femmes et
tous les hommes qui m’accompagnent dans l’exécution du contrat de confiance qui
me lie au peuple, comprennent et acceptent que cette mission ne crée pas une
catégorie de citoyens privilégiés, au-dessus des autres et de la loi ».
Les manifestations de soutien orchestrées par des politiciens à
l’égard de Karim Wade ne sauront être l'arbre qui cache la forêt car c'est de
la poudre aux yeux des Sénégalais. Ceux qui s’évertuent à le faire espèrent exercer,
par le tapage, leur propre défense. Donc, il ne s'agit point d'un acharnement,
ni d'une chasse aux sorcières, mais tout simplement d’une obligation de rendre
compte comme cela se fait dans tout pays organisé. L’activation de la CREI et
la mise en place de l’OFNAC (office national de lutte contre la fraude et la
corruption) constituent des dispositifs juridiques républicains qui méritent
d’être salués et encouragés. Notre pays a trop souffert des crimes économiques
impunis. Il est temps d’instaurer dans nos pratiques managériales la culture de
contrôle et de reddition des comptes. Aux partisans de Karim Wade et à sa
cohorte de robes noires sous l’égide de son ex collègue maître El Hadji Amadou
Sall, nous rappelons que la prison est un haut lieu du pacte républicain et que
nul ne doit être au dessus des lois.
Dans un pays si faiblement classé dans le concert des nations ;
PMA (Pays les Moins Avancés) ou PPTE (Pays Pauvres Très Endettés), s’indigner
contre l’enrichissement non justifié est un devoir. Le tournant des années 2000 a vu émerger des
situations d’aisance qui insultent l’éthique et compromettent le principe
républicain d’égalité. L’agressivité de certaines habitations dakaroises en est
le témoin. Quel salaire doit permettre, dans la fonction publique d’un pays
comme le nôtre, d’acquérir en moins de trois ans une maison évaluée à des
centaines de millions, d'avoir une voiture de plusieurs millions de nos
francs, de voyager et de vivre dans une opulence soutenue ? C’est encore
plus choquant lorsque le riche en question n’a aucun mérite, ni même, parfois,
la qualification pour prétendre à ces opportunités. Pendant ce temps, notre
jeune et dynamique population sombre dans une précarité et une misère sans nom.
Pourtant, nous n’avons même pas besoin de regarder loin pour trouver des
exemples de sobriété aux hautes sphères de l’État. Avez-vous jamais vu un membre
de la famille ou un proche de Senghor, Abdou Diouf ou Mamadou Dia briller par
l’insolence d’une fortune soudaine ? La gouvernance vertueuse dont parle
Macky Sall est plus qu’un slogan donc prouvez vos vertus ou bienvenue à
Rebeuss !
Ben Yahya SY, CCR France/Sénégal

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